L’impôt et le droit de suite : Article 1755

En matière fiscale, le législateur français prévoit un dispositif spécifique pour assurer le recouvrement des impôts et taxes dus par les contribuables : le droit de suite. Cet outil juridique permet à l’administration fiscale d’exercer son pouvoir de poursuite sur les biens du débiteur, même en cas de transfert de propriété. L’article 1755 du Code général des impôts en constitue la pierre angulaire. Décryptage.

Principe et fonctionnement du droit de suite

Le droit de suite est un mécanisme qui permet à l’administration fiscale d’assurer le recouvrement des impôts et taxes en poursuivant les biens du débiteur, même après un changement de propriétaire. Ce dispositif vise ainsi à prévenir les situations d’évasion fiscale ou de dissimulation de patrimoine.

Dans ce cadre, l’article 1755 du Code général des impôts prévoit que « Les impositions directes établies au nom du propriétaire d’un immeuble peuvent être recouvrées sur tous ses autres immeubles ». Autrement dit, si un contribuable ne s’acquitte pas de l’impôt dû sur l’un de ses biens immobiliers, l’administration peut exercer son droit de suite sur ses autres biens immobiliers.

Les conditions d’exercice du droit de suite

Le droit de suite ne peut pas être exercé de manière automatique et sans condition. Plusieurs éléments doivent être réunis pour que l’administration puisse mettre en œuvre cette procédure :

  • Il doit s’agir d’impositions directes, c’est-à-dire des impôts établis au nom du propriétaire d’un bien immobilier (par exemple, la taxe foncière ou la taxe d’habitation).
  • Les impôts concernés doivent être dûment constatés et leur montant doit être déterminé.
  • Le débiteur doit avoir été mis en demeure de payer, sans succès.

Ces conditions visent à garantir un certain équilibre entre les droits et obligations du contribuable et ceux de l’administration fiscale. Elles permettent également d’éviter les abus et les erreurs dans la mise en œuvre du dispositif.

Les limites du droit de suite

Toutefois, le droit de suite ne constitue pas une arme absolue pour l’administration fiscale dans sa lutte contre la fraude fiscale. Plusieurs limites peuvent ainsi être identifiées :

  • Le délai de prescription pour le recouvrement des impôts est fixé à quatre ans, ce qui signifie que l’administration ne peut plus exercer son droit de suite au-delà de cette période.
  • En cas de transfert de propriété entre personnes morales (par exemple, lors d’une cession d’entreprise), le droit de suite ne s’applique pas automatiquement. L’administration doit alors prouver que la cession a été réalisée dans un but exclusivement fiscal.
  • Enfin, le droit de suite ne peut être exercé sur les biens des héritiers ou légataires du débiteur, sauf dans certaines situations spécifiques (par exemple, si ces derniers ont commis des manœuvres frauduleuses pour échapper au paiement des impôts).

Le droit de suite constitue donc un outil juridique précieux pour l’administration fiscale, mais il est encadré par des conditions et des limites qui visent à protéger les droits des contribuables. Il appartient en définitive au juge de trancher en cas de conflit entre l’administration et le contribuable concernant l’exercice de ce droit.

En conclusion, l’article 1755 du Code général des impôts permet à l’administration fiscale d’exercer son droit de suite afin d’assurer le recouvrement des impositions directes dues par les propriétaires d’immeubles. Ce dispositif vise notamment à prévenir les situations de fraude fiscale et à garantir l’équité entre les contribuables. Toutefois, son champ d’application est encadré par des conditions strictes et des limites légales destinées à éviter les abus et à protéger les droits des citoyens.